Depuis 34 ans, le Somaliland, autoproclamé indépendant de la Somalie en 1991, s’efforce de faire reconnaître sa souveraineté sur la scène internationale. Cette ancienne colonie britannique, dotée d’institutions démocratiques robustes, d’une stabilité politique remarquable et d’un port stratégique à Berbera, intensifie aujourd’hui ses efforts diplomatiques. En août 2024, le gouvernement somalilandais a formé un groupe de travail ministériel dédié à la reconnaissance internationale, tandis que le président Abdirahman Mohamed Abdullahi Ero a adressé des lettres à plus de 130 dirigeants mondiaux, plaidant pour la reconnaissance de la République du Somaliland. Ces démarches, appuyées par un protocole d’accord signé avec l’Éthiopie en janvier 2024, pourraient bouleverser l’équilibre des puissances dans la Corne de l’Afrique.
L’accord avec l’Éthiopie, qui offre à ce géant régional un accès à la mer via le port de Berbera en échange d’un soutien à la reconnaissance du Somaliland, est un tournant stratégique. Il reflète l’importance croissante de la mer Rouge et du golfe d’Aden, où les rivalités économiques et géopolitiques s’intensifient. Cependant, cet accord a suscité l’ire du gouvernement fédéral somalien, qui y voit une menace à l’unité nationale. Le président Hassan Sheikh Mohamud a même signé une loi pour l’annuler. À cela s’ajoute l’opposition de Djibouti, qui craint de perdre son rôle de hub portuaire régional face à la montée de Berbera.
Au-delà des rivalités régionales, le Somaliland gagne du terrain sur la scène internationale, notamment aux États-Unis. En décembre 2024, le représentant Scott Perry a déposé un projet de loi au Congrès américain appelant à reconnaître le Somaliland comme État indépendant. Une étude de la Hoover Institution, dirigée par l’ancienne secrétaire d’État adjointe Jendayi Fraser, renforce cette position en soulignant l’importance stratégique du Somaliland pour les intérêts américains dans une région volatile.
Ces développements posent une question cruciale : la reconnaissance du Somaliland est-elle imminente ? Après des décennies de marginalisation, ce territoire a prouvé sa capacité à fonctionner comme un État viable, avec des élections régulières, une sécurité renforcée et une diplomatie axée sur la paix et la coopération. Pourtant, l’opposition de la Somalie et de certains voisins, comme Djibouti, complique le chemin vers la reconnaissance. L’Éthiopie, en quête d’un corridor maritime, pourrait être un allié décisif, mais son soutien risque d’attiser les tensions régionales.
Le Somaliland se trouve à un moment charnière. Sa quête d’indépendance, loin d’être une simple aspiration locale, pourrait redessiner les dynamiques géopolitiques de la Corne de l’Afrique. Alors que le port de Berbera attire l’attention des grandes puissances et que les appels à la reconnaissance se multiplient, la question n’est plus de savoir si le Somaliland sera reconnu, mais quand et à quel prix. Riad