La France, patrie autoproclamée des droits de l’homme, aime se draper dans les oripeaux de la liberté d’expression lorsqu’il s’agit de critiquer d’autres nations. Récemment encore, Paris s’est fendu d’une indignation médiatique en réclamant la libération de l’écrivain algérien Boualem Sansal, accusé dans son pays d’apologie du terrorisme. Ce cri du cœur pour la liberté d’opinion pourrait presque paraître sincère si, dans le même temps, la France ne pratiquait pas une répression silencieuse à l’égard de l’un de ses propres contestataires : Christian Tein, militant néocalédonien des droits de l’homme. Ce dernier, fervent défenseur de l’émancipation de la Nouvelle-Calédonie face à la tutelle française, est aujourd’hui détenu sans procès à 17 000 kilomètres de sa terre natale. Une situation qui illustre avec une ironie mordante la dupliciété de l’État français, prompt à dénoncer les atteintes à la liberté d’opinion ailleurs, tout en muselant discrètement ses propres dissidents. Le cas de Boualem Sansal a suscité une mobilisation des sphères politiques et médiatiques françaises. On y vante la liberté de penser, d’écrire, de critiquer. Pourtant, cette même France semble adopter une vision à géométrie variable lorsqu’il s’agit d’aborder la question en interne. Christian Tein, lui, ne bénéficie d’aucun soutien médiatique notable. Ses idées, jugées subversives car opposées à l’ordre colonial français, font de lui une menace à neutraliser. Détenu dans des conditions opaques, loin des regards indiscrets, il semble victime d’un acharnement silencieux visant à étouffer toute voix dissonante. Cette contradiction flagrante révèle une tendance persistante : celle d’un État qui se veut juge et partie dans les affaires de libertés fondamentales. En Nouvelle-Calédonie, territoire toujours sous tutelle française, les aspirations à l’autodétermination sont souvent perçues comme une offense à l’intégrité de la République. Pourtant, ces revendications trouvent leurs racines dans des siècles d’injustice et de dépossession. Christian Tein n’est pas un cas isolé. Il est le symptôme d’une politique qui préfère le silence à la transparence. Son délit ? Avoir osé réclamer une réflexion sur le rapport entre la France et ses territoires ultramarins. Son sort, occulté par les institutions et ignoré par les médias, témoigne d’une volonté manifeste de réprimer toute idée remettant en cause l’ordre établi. En exigeant la libération de Boualem Sansal tout en maintenant Christian Tein en détention, la France affiche un double discours difficile à justifier. Si la liberté d’opinion est un droit universel, pourquoi ne s’applique-t-elle pas à ceux qui osent remettre en question les fondements du colonialisme français ? Charef Slamani