La chute de Bruno Retailleau, ministre français de l’Intérieur, sonnera comme un désaveu cinglant d’une diplomatie musclée et unilatérale. Après des mois de tensions avec l’Algérie, marqués par des menaces de sanctions contre Air Algérie et des appels à une « riposte graduée », le président français Macron a finalement choisi de tourner la page. Un revirement stratégique qui consacre la primauté du dialogue sur la confrontation, malgré les critiques d’une droite nostalgique d’un rapport de force stérile. Retailleau incarnait une ligne dure, accusant Alger de « ne pas respecter le droit » en refusant systématiquement le retour de ses ressortissants sous OQTF, exigeant des laissez-passer consulaires jugés abusifs par Paris. Ses menaces de sanctions économiques, notamment contre Air Algérie, et ses appels à une « riposte graduée », réductions de visas, remise en cause des accords de 1968, ont exacerbé les tensions, transformant un dossier migratoire complexe en crise diplomatique.
Pire, cette posture a été perçue comme une tentative de « recolonisation » symbolique, ravivant les blessures historiques. Jean-Luc Mélenchon l’a résumé avec ironie : « L’Algérie et la France, c’est sérieux. Ce n’est pas pour Retailleau et ses provocations de petit politicien ». Une critique partagée par des diplomates, qui dénonçaient depuis des mois l’ingérence du ministère de l’Intérieur dans des dossiers relevant traditionnellement du Quai d’Orsay.
Le limogeage de Retailleau coïncide avec un virage pragmatique. La reprise de la coopération migratoire et sécuritaire, scellée par un communiqué conjoint Macron-Tebboune, marque un retour à une approche multilatérale. La visite prochaine de Jean-Noël Barrot et Gérald Darmanin à Alger vise à consolider cet apaisement, avec pour priorités la gestion des expulsions et la lutte contre le terrorisme deux sujets où l’intransigeance de Retailleau s’était heurtée à un mur.
Ce réalignement s’explique aussi par des impératifs géostratégiques. L’Algérie, partenaire clé en matière énergétique et pilier de la stabilité au Sahel, reste un interlocuteur incontournable. La reconnaissance par Paris de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental en 2024 avait déjà fragilisé les relations ; Macron ne pouvait risquer une rupture durable.
L’enjeu désormais est de reconstruire une relation équilibrée, libérée du poids des rancœurs postcoloniales. Les déclarations de David Guiraud (LFI) rappellent l’essentiel : « L’Algérie n’est plus une colonie française ». Cela implique de privilégier les canaux diplomatiques traditionnels et de reconnaître qu’un partenariat durable ne se bâtit ni par le chantage ni par les ultimatums.
La page Retailleau se tourne, non sans ironie, alors que s’ouvre peut-être une ère de maturité dans les relations franco-algériennes. Gageons que les leçons de cet épisode – l’inefficacité des menaces unilatérales et la nécessité du dialogue – inspireront une diplomatie moins clivante. Car comme le rappelait Dominique de Villepin : « Ce n’est jamais dans l’escalade qu’on règle les crises ». Riad






























