La guerre civile soudanaise, brutalement relancée sous les projecteurs internationaux, pose une question explosive : le Soudan osera-t-il passer à l’offensive contre les Émirats arabes unis ? Les accusations de génocide et de crimes de guerre, portées devant la Cour internationale de justice (CIJ) contre Abu Dhabi pour son soutien présumé aux Forces de soutien rapide (FSR), ont franchi un seuil dangereux. Les frappes de drones sur Port-Soudan, que Khartoum attribue avec virulence aux Émirats, et les sanctions américaines controversées contre les Forces armées soudanaises (SAF) pour une prétendue utilisation d’armes chimiques – démentie par Khartoum – ont envenimé une crise déjà chaotique. Cette escalade, soulignée par le secrétaire d’État Marco Rubio lors d’une audition sénatoriale, révèle un conflit où les acteurs extérieurs, notamment les Émirats, jouent un rôle de plus en plus provocateur.
Le rejet par la CIJ, le 5 mai, de la plainte soudanaise pour motif juridictionnel a été célébré par Abu Dhabi comme une victoire, mais cette décision procédurale n’efface pas les soupçons d’implication émiratie, corroborés par des rapports d’experts et des médias. La rupture diplomatique du 6 mai, qualifiant les Émirats d’« État agresseur », et les accusations d’Al-Harith Idris aux Nations unies – pointant une base émiratie sur la mer Rouge – traduisent une colère palpable. Pourtant, une attaque conventionnelle reste irréaliste : les SAF, engluées dans leur lutte contre les FSR, manquent de moyens pour défier un géant pétrolier soutenu par Washington. Le risque immédiat est ailleurs : Khartoum pourrait frapper le Tchad ou le Soudan du Sud, accusés de faciliter les livraisons d’armes émiraties, déclenchant une spirale régionale.
L’engagement chaleureux de l’administration Trump avec les Émirats, illustré par des accords de 200 milliards de dollars et des déclarations flatteuses envers Mohamed bin Zayed, contraste avec l’inaction face à leur rôle dans le chaos soudanais. Rubio a beau dénoncer une « guerre par procuration », la diplomatie américaine, dépourvue d’envoyé spécial et d’une stratégie claire, peine à canaliser la crise. Les SAF, galvanisées par un discours de « dignité » contre les FSR accusées de génocide, et ces dernières, décidées à s’imposer politiquement, rendent toute paix illusoire.
Sans pression multilatérale sur Abu Dhabi, ce conflit risque de s’étendre, transformant une guerre civile en un brasier régional. L’Occident doit choisir : cautionner les ambitions émiraties ou exiger une désescalade, avant qu’une erreur ne fasse basculer tout le Sahel. Riad