C’est désormais clair : le « Gazoduc transsaharien (TSGP), reliant le Nigéria à l’Europe via l’Algérie, n’est pas un mirage du désert. À Doha, le ministre nigérian des Ressources pétrolières, Ekperikpe Ekpo, a mis fin aux rumeurs et aux spéculations : le projet avance, et le partenariat avec Alger et Niamey reste solide.
Une déclaration qui a eu l’effet d’un coup de tonnerre à Rabat, où l’on rêvait encore d’un « corridor énergétique » vers l’Europe en contournant l’Algérie. Depuis plusieurs mois, un discours persistant, soutenu par une communication soigneusement orchestrée côté marocain, tentait de faire croire que le TSGP avait été enterré au profit du gazoduc Nigeria–Maroc, un projet alternatif lancé en 2016 par le roi Mohammed VI. Mais les faits sont têtus.
L’option algérienne reste la plus crédible, la plus rentable et la plus rapide. Pourquoi ? Parce que l’Algérie dispose déjà d’un réseau d’infrastructures gazières performant, de trois gazoducs opérationnels vers l’Europe, et d’une expertise éprouvée dans le transport et la commercialisation du gaz.
Rabat, de son côté, mise sur un rêve géopolitique qui se heurte à la réalité économique : un tracé de plus de 5 600 kilomètres, traversant 14 pays, pour un coût faramineux et des défis sécuritaires considérables. Qui financera ce chantier titanesque ? Le Maroc, déjà en quête de liquidités, n’a pas les moyens d’assumer seul ce fardeau. Les bailleurs internationaux se montrent prudents, tandis que les investisseurs privés refusent à s’engager dans une zone à risque.
Le Nigéria, pragmatique, regarde donc vers le nord. L’alliance avec Alger lui offre un accès direct et rapide au marché européen, à travers des infrastructures existantes et sécurisées. Les 200 millions de dollars débloqués pour l’actualisation des études de faisabilité témoignent d’une volonté politique ferme. Le choix d’un cabinet britannique, « Penspen », pour piloter la nouvelle évaluation technique, confirme la dimension internationale du projet.
Au-delà de la bataille des tuyaux, c’est une bataille d’influence qui se joue en Afrique. D’un côté, une Algérie ancrée dans sa logique de coopération Sud–Sud, forte de sa crédibilité énergétique. De l’autre, un Maroc en quête de positionnement stratégique, usant de diplomatie économique et d’alliances opportunistes. Mais dans le domaine du gaz, les symboles ne suffisent pas : ce sont les pipelines, les stations de compression et les terminaux d’exportation qui font la différence.
Le message du ministre nigérian est limpide : le TSGP est « le projet officiel », celui qui avancera. Les rêves marocains de supplanter Alger sur le terrain gazier viennent d’être douchés par le réalisme d’Abuja. Et à l’heure où l’Europe cherche désespérément à diversifier ses sources d’énergie, le « corridor algérien » apparaît comme une voie naturelle, fiable et géopolitiquement cohérente. Entre mirage et réalité, le Sahara a tranché : le gaz nigérian coulera bien vers le nord, par Alger, pas par Rabat. Riad






























